Bonnes gens bien placées, bonnes gens bien élevées. Vous avez la chance qui vous colle aux basques, tellement que ça en devient humiliant pour nous les autres. Vous êtes beaux, on vous aime, on vous adule. Vous et vos petites familles, vos petits boulots bien tranquilles, vous et votre vie parfaite. Vous vous levez le matin et vous savez que votre journée va être bonne. Londres vous aime, elle vous respecte. Elle vous donnerait même le Bon Dieu sans confession. Vous êtes ces gens qu'on peut voir sur ces affiches publicitaires pour le bonheur éternel. Mais il faut tout de même faire attention, personne n'a encore certifié que votre Eldorado n'était pas éphémère. Monde de plastique, de belles paroles et d’hypocrisie empoisonnée. Faites donc attention bonnes gens et priez pour que la chance continue de vous sourire encore longtemps.

Toi, moi et les autres, on est pareils non ? Deux bras, deux jambes, une tête, un être humain en somme. On a les mêmes galères, les mêmes envies, les mêmes malheurs. Et c'est ce qui nous rapproche. Nous les habitants lambda, nous les Londoniens d'hier et de demain. Nous on ne cherche pas à être différents, au contraire, on se font dans la masse. On est normaux, sans plus particulier, sans de défaut moindre. Juste un homme qui tente de suivre son petit bout de chemin. Bien entendu, il pourra y avoir parmi nous des gens au destin extraordinaire, qui marqueront le monde de leur présence, mais ils n'en savent rien, contrairement aux gens bien placés. Nous on est un peu comme les révolutionnaires du silence, à mener notre petit bonhomme de chemin, et à espérer cogner la chance au moins une fois sur notre route.

On nous fuit. On change de trottoir quand on nous voit, et on prévient les enfants de ne pas nous approcher. Nous on est les méchants. Les bad guys qui ont une bad influence on all of you guys. On ne fréquenterait que les bars, les endroits malfamés, et on aurait déjà fait des années de taule. On a peur de nous, de l'influence qu'on pourrait avoir sur les jeunes âmes égarées. On est les rockeurs de notre génération, on live fast to die young. On profite de la vie à notre façon, et on est jugés pour ça. Pour ne pas entrer dans le moule de cette société pré-découpée. On nous jette nos erreurs à la figure et on nous laisse là, à croupir dans notre peine. Ouais, Londres ne nous aime pas vraiment, mais à nous de lui montrer qu'elle a tord. Ou raison, à bon entendeur.